CPE cinq ans dans un lycée : ai-je changé la vie ?
Rédigé par antistress le 29 juin 2020 - 1 commentaireAyant passé le concours de CPE il y a six ans pour entamer une seconde carrière professionnelle, et après une année de titularisation dans un collège parisien, je m'apprête à laisser le poste qui fut le mien pendant cinq ans dans un lycée de la banlieue parisienne pour en prendre un autre.
Ai-je changé la vie ?
La question peut paraître étrange, pour ne pas dire prétentieuse.
J'ai onze ans lorsque sort sur les ondes, en 1988, le titre « Il changeait la vie » de Jean-Jacques Goldman. Depuis, cette chanson n'a cessé de me hanter.
Je m'estime chanceux : au cours de ma reconversion et depuis, j'ai croisé des personnes dont je peux dire qu'elles ont changé ma vie. En ai-je fait de même ?
Au cours d'un entretien que j'ai mené cette année avec une élève de seconde, je lui ai demandé quel était son projet de vie. Y ayant visiblement déjà réfléchi, elle me répond aussitôt qu'elle souhaite être une femme forte et indépendante. Je la félicite pour ce projet pour elle-même, et l'encourage à réfléchir également à un projet pour les autres. À titre d'exemple, je lui confie que je ne suis pas parfait. Que, comme tout le monde, j'ai ma part d'ombre. Mais qu'à la fin j'espère que j'aurai fait plus de bien que de mal, et qu'en attendant cette résolution guide mes pas.
Ça, c'est le projet que j'ose m'avouer. Mais ça n'en représente, en réalité, qu'une partie.
Au fond de moi, il y a ce projet plus ambitieux, plus complet, plus narcissique – celui de mon enfant intérieur : l'espoir et l'envie de changer la vie.
Et je viens de me le reprendre en pleine figure, tandis que des collègues m'écrivent gentiment pour témoigner de ce que je leur ai apporté, et comment ma posture posée et bienveillante auprès des élèves, après les avoir dans un premier temps désarçonnés, les a fait évoluer dans leurs représentations et leur pratique.
Et il y a bien sûr ces jeunes, à la fois forts et fragiles, avec leurs difficultés, leurs peines et leurs soucis, dont j'ai essayé de rendre le quotidien plus supportable, et pour lesquels je ne peux qu’espérer y être un temps soit peu arrivé.
C'est en tout cas vers eux qu'est tourné mon projet d'enfant.
Voilà comment j'en viens, à ce moment de ma vie, à oser m'avouer le dessein que mon enfant intérieur s'est choisi et que l'adulte que je suis avait consciencieusement enfoui toutes ces années.
« Il changeait la vie » de Jean-Jacques Goldman, sur l'album Entre gris clair et gris foncé.